Cérémonie de la Flamme : un siècle de lumière

Dossier
Mise à jour le 17/11/2023
Le 11 novembre 1923, André Maginot, ministre de la Guerre, alluma la Flamme pour la première fois. Depuis, celle-ci ne s’est jamais éteinte et chaque soir sous l’Arc de Triomphe, une cérémonie solennelle de ravivage y est organisée. Symbole de la mémoire et de la cohésion. Retour sur un siècle d’Histoire, d’anecdotes et de lumière.
À la suite du traumatisme de la Première Guerre mondiale (1,4 million de morts, 3,6 millions de blessés, plus d’un million d’invalides civils et militaires), les autorités nationales et les associations ont organisé le culte de la mémoire des soldats morts pour la France afin de perpétuer aux travers de lieux symboliques l’exemple de leur patriotisme et de leur sacrifice. L’idée d’un culte rendu à la dépouille d’un soldat inconnu qui représenterait tous les combattants français tombés au champ d’honneur lors de la Grande Guerre germe dès 1916. Au travers des journaux de l’époque, la bataille du lieu d’inhumation se joue. Ce n’est que le 8 novembre 1920 que la Chambre des députés puis le Sénat vote une loi instituant l’inhumation d’un soldat inconnu sous l’Arc de Triomphe.
C’est ainsi que le 10 novembre 1920, à Verdun, le soldat Auguste Thin, avec à ses côtés, André Maginot -alors Ministre des pensions- désigne le soldat inconnu parmi 8 cercueils, contenant les corps de 8 soldats français non identifiés pris dans 8 des 9 secteurs du front, « de la mer aux Vosges ». Il est transféré sous l’Arc de Triomphe le 11 novembre 1920 puis sera inhumé à son emplacement définitif le 28 janvier 1921 (lire « Paris 8e » numéro 132, février 2021). Voilà pour le symbole. Mais pour faire vivre celui-ci, il fallait imaginer un rituel participatif. En 1923, le journaliste Gabriel Boissy suggère qu’une Flamme du Souvenir veille nuit et jour sur la tombe sacrée. « La Flamme, comme un feu follet, jaillira du sol. Elle sera vraiment comme l’âme du Mort résurgente. Elle palpitera, elle veillera. […] Sa palpitation atteindra ce haut résultat de contraindre tous les passants à une seconde de recueillement. Cette seconde les incitera à un rapide examen de conscience, à ce rappel des vertus nécessaires lorsque le devoir, l’honneur ou la simple nécessité nous appellent ».
Un message entendu puisque le 11 novembre 1923, la Flamme est allumée pour la première fois par André Maginot, devenu ministre de la Guerre. Depuis, cette tradition ne s’est jamais éteinte, en temps de guerre comme de paix et en dépit de conditions météorologiques.

Une cérémonie toujours plébiscitée

L’an passé, plus de 62000 personnes y ont participé: classes d’élèves parfois venues de loin, associations, familles de militaires ou citoyens de France ou du monde soucieux d’apprendre et de rendre hommage. Près de 50000 autres personnes l’ont visitée, à l’occasion d’un passage touristique ou d’une promenade dans le quartier. 1868 gerbes ont été déposées en 2022, sachant que ce chiffre ne comptabilise pas les fleurs apportées individuelle[1]ment. Une fréquentation toujours forte pour un site unique, où l’émotion se vie à 360 degrés : à l’épicentre de la place de l’étoile.=

Participer à un ravivage

L’association « la Flamme sous l’arc de Triomphe » est aujourd’hui une grande famille dans laquelle se côtoient les commissaires de la Flamme (habilités à procéder au ravivage) les historiens, les militaires, les porte-drapeaux… dans un esprit de cohésion républicaine. Le général Bruno Dary qui fut son président durant 10 ans a cédé sa place au Général de corps d’armée Christophe De Saint-Chamas, gouverneur des Invalides.
Les associations adhérentes ou les organisations (écoles, mairies…) de toutes localités qui souhaitent participer à un ravivage, à un dépôt de gerbe ou à une prise de Flamme, doivent impérativement s’inscrire sur le site www.laflammesouslarcdetriomphe.org.
Une participation sous forme de don pour aider aux activités est demandée aux organisations non adhérentes (100 € pour les mairies de plus de 5000 habitants, 30€ pour les mairies de plus petite taille, établissements scolaires et autres entités). Le nombre de jeunes par réservation est limité à une quarantaine. Une tenue correcte et sobre est attendue sur site, en signe de respect lors de votre venue sous l’Arc de Triomphe. Si vous souhaitez filmer votre cérémonie sous l’Arc, vous devrez demander l’autorisation du Centre des Monuments Nationaux au moins 3 semaines à l’avance.
La cérémonie du ravivage de la Flamme en tant que telle n’est pas ouverte aux particuliers, mais ceux-ci peuvent tout de même la suivre derrière les barrières de sécurité.

«La Flamme, comme un feu follet, jaillira du sol. Elle sera vraiment comme l’âme du Mort résurgente. » Gabriel Boissy

Une année de célébration

En cette année particulière du centenaire, plusieurs événements ont été organisés par l’association. Le dernier en date a eu lieu à la mairie du 8e, il y a quelques semaines : Thierry Laurent, commissaire de la Flamme et ancien professeur à la Sorbonne a assuré une conférence publique : « Je me suis surtout intéressé aux cérémonies qui ont eu lieu durant la 2nd guerre mondiale, puisque la Flamme a toujours perduré. L’ambiance était particulière: il n’y avait pas de marseillaise sous l’occupation allemande et les cocardes étaient interdites. Quelques fois les choses ont dégénéré par la répression. La cérémonie a également fait l’objet de tentatives d’instrumentalisation par les collaborationnistes ».
Thierry Laurent est un patriote de la première heure: « enfant, je regardais les cérémonies de la Flamme dans les médias et cela m’impressionnait. Après les attentats de 2015, j’ai voulu m’engager. Je suis devenu réserviste citoyen. L’histoire de la guerre me passionne ». C’est ainsi que 4 à 5 jours par mois, Thierry Laurent se rend sous l’Arc de Triomphe en tant que commissaire de la Flamme, au service de la Nation.
Quand il s’agit de révéler des anecdotes sur ce centenaire, l’ancien professeur affiche un large sourire : « cette grande famille a su évoluer. Au départ, le ravivage de la Flamme réunissait les militaires et des hommes civils. Les deux derniers présidents, en particulier le général Dary durant une décennie, ont rajeuni l’audience. De plus en plus de jeunes et de femmes sont aujourd’hui au premier plan ». Un concours de dessin a aussi été organisé cette année auprès des classes ayant participé à un ravivage. « Raconte-moi la Flamme » à récompensé le ressenti et la réflexion des jeunes, au retour d’une cérémonie du ravivage de la Flamme (le Comité de la Flamme a reçu l’agrément national du ministère de l’Éducation Nationale).

« Enfant, je regardais les cérémonies de la Flamme dans les médias et cela m’impressionnait. Après les attentats de 2015, j’ai voulu m’engager. » Thierry Laurent